Le Blog de Stéphane Loisel

Garder le fruit

Pour mon premier millésime, j’ai envie de faire un vin sur le fruit, relativement facile à boire, un « vin de soif » comme l’on dit souvent, mais je n’aime pas cette formule, j’y trouve un côté péjoratif, j’imagine toujours un vin dilué, sans intérêt. Je préfère l’expression « vin de copains » ou de copines bien sûr. Le vin que l’on boit sans soif, tout au long de la nuit, avec lequel on ne se prend pas la tête pour savoir s’il va aller sur tel ou tel plat. Bref, j’aimerai qu’il soit ton compagnon pour tes longues soirées de l’été prochain, avec tes amis autour d’un barbecue, un simple rôti ou alors des charcuteries.

Ce vin, je compte le mettre en bouteille au printemps prochain, pour que tu puisses en profiter rapidement et que tu aie le temps d’en racheter avant d’attendre le millésime suivant :-). Pour cela, je n’ai sans doute pas choisi la facilité en achetant des raisins à Maury. En effet, ce terroir est assez particulier et est naturellement très pauvre, en donne donc des rendements relativement faible, de l’ordre de 30 hl/ha. De plus, il donne très facilement des degrés alcooliques élevés et conduisent à des arômes de fruits confiturés voir de fruits à l’eau de vie.

Je souhaite éviter ça. Je souhaite conserver des arômes de fruits frais. Pour essayer de conserver ces arômes j’ai donc adapté ma vinification, en chercher à extraire un maximum de composés avant le début de la fermentation. Depuis le début de la fermentation, je ne réalise que des remontages pour éviter que le dessus du chapeau ne se dessèche et pour alimenter les levures en oxygène.

Voilà maintenant une semaine que la fermentation a démarrée et la densité (ou masse volumique) perd environ 10 points par jour. Ce matin, elle était à 1049. autant dire qu’il commence à y avoir pas mal d’alcool (environ 7 %), et vu le type de vin que je souhaite réaliser, il ne faut pas que j’extraie beaucoup de tanins, et comme ils sont plus solubles dans l’alcool que dans l’eau, il faut que je les enlève. Pour enlever ces tanins, il n’y a qu’une solution : enlever les raisins de la cuve où ils macèrent. Alors, demain, c’est décuvage, une opération pas très complexe mais importante dans le fil de la vinification.

Et promis, je vais te mettre un petit commentaire de dégustation !

Photos de vendanges

Tout est dans le titre :

Vendange de la première parcelle, celle de grenache noir (en fait il y a aussi un peu de carignan, en bas, près du camion) le samedi matin

Une fois les raisins cueillis et dans leur comporte voilà ce que ça donne

 

Une fois les comportes mises dans le camion et transportées jusqu'au chai, on les déverse dans un égrappoir afin de séparer les baies de la rafle (la partie végétale qui forme la grappe) et d'enlever les éléments indésirables, principalement les feuilles

 

Les raisins sont ensuite poussés par une pompe à vendange dans la cuve que voilà

La même cuve vue de dessus, juste après le remplissage des grenaches

 

Le soir, après un délestage et passage au froid, voilà la couleur obtenue (elle est quand même un peu faussée par la photo)

 

Et enfin la plus belle pour la fin, les vendanges du carignan à Cabirou Bas le dimanche matin, après la pluie.

 

Première frayeur…

Ce matin, comme tous les matins depuis dimanche, j’ai rendez-vous avec elle. Comme tous les matins, elle était là et attendait patiemment mon arrivée. Comme tous les matins, je commence par lui lever le chapeau (et oui, c’est beaucoup plus galant de commencer par le chapeau) et la renifler. Au milieu de quelques drosophiles contre lesquelles je lutte depuis hier matin, je sens une méchante odeur de vernis à ongles. Mais que me fait-elle ? Veut-elle se faire belle pour moi ? Mais je ne veux pas de ça !!! Je voudrais qu’elle sente le fruit, les épices plutôt, et dans peu de temps qu’elle se mette à pétiller !!

Elle, c’est ma cuve.

Et ce matin elle m’a fait peur.

Cette odeur de vernis à ongles (de l’acétate d’éthyle pour les chimistes) est une des composantes de l’acidité volatile (avec l’acide acétique, le vinaigre) et est un des défauts les plus rédhibitoires dans un vin. Heureusement, Serge était là et m’a rassuré. Cette odeur et normale dans le cas de macération pré-fermentaire à froid et disparaîtra lors de la fermentation.

Ceci dit, j’étais tout de même un peu anxieux lorsque je l’ai dégusté ce matin. Mais tout allait bien dans le verre. Des notes d’épices se développent au nez (cannelle et curry) et en bouche, on sent déjà un certain volume qui est pour l’instant complètement sur le fruit. J’ai hâte que la fermentation débute pour voir comment cela va évoluer !!

Au final, elle m’a rassurée.

Dès que le vent soufflera…

Ouf, dans la nuit de samedi à dimanche la tramontane c’est levée et a nettoyé le ciel de ses méchants nuages chargés de pluies.

Les carignans de caribou bas ont donc été cueillis. La parcelle était très légèrement touchée par l’oïdium. Nous sommes donc passés avec le propriétaire de la vigne avant les vendangeurs pour enlever les grappes touchées. Une méchante petite bête appelée eudémis avait également piqué quelques baies mais sans conséquences.

Les raisins étaient très jolis, dans un très bon état sanitaire, il ne me reste plus qu’à bien les travailler pour obtenir un beau vin. J’ai déjà réalisé un gros remontage hier avec passage au froid et un plus léger ce matin, juste pour mouiller le chapeau. Pour ce soir, un bon délestage avec refroidissement du moût est prévu afin d’extraire un maximum de fruit et d’éviter que la fermentation alcoolique démarre tout de suite.

….C’est la fête à la grenouille

On m’avait dit « vient dans le Roussillon, il fait toujours beau, ça te changera de ta Normandie ! » Bah tiens, je demande qu’il fasse beau rien qu’une journée, juste une et bien non : de l’eau, de l’eau et encore de l’eau.

Ce matin, debout à 7h pour aller chercher le camion de location et hop je file à Maury. Plus j’avançais dans la vallée, plus le temps était sombre. Heureusement, l’équipe de vendangeurs a débuté à 7h30 à couper les raisins. Lorsque j’arrive vers 8h45, une trentaine de comportes sont pleines de grenache. Le temps de les charger et une autre trentaine est prête. Mais les choses se gâtent. Il crachinait depuis quelques minutes et maintenant c’est une bonne averse qui tombe. Plus possible de cueillir, les raisins sont trempés.

Francis, tu n’aurais pas été dépaysé ce matin, pour un peu, on se serait cru en Champagne !!

Que faire !!??!! On décide de ramener à Rivesaltes les raisins cueillis et de voir pour finir la parcelle. Après environ 30 minutes et un peu de vent, les raisins ne semblent pas trop humides, on décide donc de finir la première parcelle le temps d’aller vider les camions. Mais pour les carignans, il faudra attendre demain, c’est trop mouillé.

Enfin, c’est comme ça, c’est la nature qui décide un peu pour nous. En espérant qu’elle sera clémente demain… Je n’ose même pas regarder les prévisions pour demain matin !!

Finalement, il y a quand même 73 comportes de grenache dans la cuve, le reste, du carignan uniquement, y sera demain midi en principe.

Mais bon, le plus important est là ! MES premiers raisins sont dans une cuve !! Et MON premier vin est en train de se faire !!! Le jus me plait, il a déjà pris une belle couleur en quelques heures et à la dégustation on est pour l’instant sur des saveurs de fraise évoluant ensuite sur des fruits plus noirs.

Promis, demain après-midi, je te raconte la suite, et la fin j’espère, du premier épisode.

Enfin, je voudrais remercier à nouveau Hervé Bizeul pour l’opportunité qu’il m’offre et pour le post qu’il a mit sur son blog (il est en lien à côté). Hervé, je t’appelle demain quand tous mes raisins sont rentrés !

Le grand jour approche

Je sais, je sais, ça fait un moment que je n’avais rien écrit mais entre le déménagement, le travail, remonter l’ordi, et des soucis de connexion, le temps passe vite !! Mais c’est terminé, je suis à nouveau opérationnel !!

Trêve de balivernes, le grand jour arrive ! Et oui, les vendanges de ma future cuvée sont programmées pour………. demain !!!

Comme je te l’ai dit un peu plus tôt, les parcelles sont situées à Maury aux lieux-dit Pech Lauzie pour le grenache et Cabirou bas pour le carignan.

Evidement, il y a eu des petits soucis, la météo d’abord !! Avec ce qui est tombé ces derniers jours dans la région, j’ai eu un peu peur mais la tramontane c’est levée ce matin et le temps est couvert maintenant mais sans risque de pluie. En plus, les températures annoncées sont assez basses, ce qui est bon pour le raisin et le futur vin ! Ensuite, il a fallu trouver des caisses pour vendanger. Je n’avais pas envie que les raisins soient mis dans une benne alors il me fallait une soixantaine de caisses, heureusement j’ai trouvé un domaine qui avait terminé sa récolte alors j’ai pu leur emprunter les leurs.

Alors voilà, c’est le grand jour demain… Un mélange de stress positif, d’envie de bien faire, d’appréhension et encore des petites incertitudes : quelle quantité de soufre (et oui, désolé pour les fanas du sans SO2 mais pour ma première cuve, je veux faire du vin, pas du vinaigre) mettre, à quelle température descendre le jus, et puis plus tard, quand décuver ?

Je pense que chacune de ces questions trouveront leur réponse au fur et à mesure de l’évolution de la cuve, en la dégustant très régulièrement au début. Mais ne t’inquiète pas, je vais te tenir au courant !!

Paysages de Maury

Je vous ai parlé de Maury et de ses schistes. Pour ceux qui n’y sont jamais allés, voici quelques photos de cette vallée glanées principalement entre le village de Maury et le Mas Amiel :

   

Au fond, les collines blanches, ce sont les Corbières et sur la crête, on peut voir également le château de Quéribus, le dernier bastion Cathare. Je vous ai aussi mis un échantillon du sol typique de Maury.

Je ne pense pas que cette fin de semaine me permette d’écrire un petit mot car c’est le grand départ samedi. Alors la prochaine fois que tu me liras (et oui, j’ai décidé de te tutoyer, lecteur), je serai installé dans notre nouvelle maison, dans le Roussillon !!

Le vin, pourquoi ? comment ?(2ème partie)

Alors voilà comment cela va se passer. Pour faire simple : j’achète des raisins et Hervé Bizeul me met à disposition une cuve dans le nouveau chai de Rivesaltes dédié à Walden, ainsi que tout le matériel nécessaire. Et là, à moi de jouer. Je réalise toutes les opérations de vinification et d’élevage que j’estime utiles, tout cela en bénéficiant des conseils d’Hervé et de toute son équipe.

Et c’est maintenant que les questions se posent… Acheter des raisins, oui mais quel cépage, quel terroir ? Les Pyrénées Orientales, c’est plus de 35 000 ha de vignes…

Il faut tout d’abord savoir quel type de vin je veux réaliser. Et ensuite, trouver les vignes qui donneront ces raisins me permettant de le faire. Pour cela, je n’ai trouvé qu’une solution : goûter, goûter et goûter encore !!! Depuis quelques mois, je ne bois plus (ou presque…) que des vins du Roussillon, en essayant de trouver un maximum d’infos sur ce vin, s’il est bon bien sûr !

Mais ce n’est pas facile. Le Roussillon est une mosaïque de terroirs, pouvant être très différents les uns des autres, différents types d’argiles, des schistes, des granits, du gneiss, conjugué à autant de micro-climats.

A cela, il faut ajouter les différents cépages, le grenache, le carignan et la syrah principalement mais aussi des cépages « atlantiques » comme le merlot ou le cabernet sauvignon, auxquels il faut ajouter des cépages plus confidentiels comme le mourvèdre (surtout planté en Provence), le cinsault (le plus souvent vinifié en rosé) ou le llodener pelut, un cousin du grenache.

Alors voilà, j’ai essayé de goûter un maximum de choses, caves coop, négociants, vignerons, en AOC, en vin de pays. J’ai déjà le goût de mon vin dans la bouche et j’ai donc cherché ce qui s’en approchait le plus et je crois avoir trouvé.

Une vallée, orientée est-ouest, subissant à la fois l’influence de la méditerranée et encore celle de l’Atlantique, des sols argilo-calcaires dans le fonds de la vallée et sur les coteaux orientés au nord et des marnes schisteuses noires comme sol. Cette vallée, surtout connue pour ses vins doux naturels, est celle de Maury. Les raisins qui produiront mon vin viendront de cette vallée, c’est sûr. Du grenache majoritairement et du carignan, c’est sûr aussi.

Alors je lance un appel, on ne sait jamais, si vous avez des vignes à Maury et que vous souhaitez vendre du raisin, envoyez-moi un mail !!

Le vin, pourquoi ? comment ?(1ère partie)

Et oui, pourquoi ? Je suis Normand, né près du Havre, bien loin du premier pied de vigne cultivé.

En fait, le virus m’a piqué lorsque j’avais 17-18 ans environ, et tout ça à cause de mon papa. Son activité professionnelle l’emmenait près des grands fleuves français : le Rhône, la Loire, la Garonne… Et comme il est amateur de vin, il ramenait toujours quelques bouteilles de ses pérégrinations.

Je me souviens très bien des 2 premières fois où j’ai vraiment ressenti une émotion en goûtant un vin. C’était un Gigondas de la cave des Vignerons de Gigondas, un choc, une révélation. Et le deuxième était un Chinon, la cuvée Le Villy de chez Maurice Raffault (Domaine du Raiffault) 1986. C’est en partie à cause de ces 2 vins que je suis ici maintenant.

Ensuite, cette passion a grandi de plus en plus. D’abord avec de la lecture, puis avec les vacances et week-end dans nos régions viticoles et enfin avec internet. Internet, quelle invention !! La découverte de la liste de discussion Iacchos en 1999 je crois. C’est grâce à ce média que j’ai pu apprendre beaucoup de chose, goûter des vins sensationnels, lire et rencontrer des vignerons passionnés.

De plus en plus, je songe à intégrer les métiers du vins, via mon ancien métier ou alors en ouvrant un commerce.

Et puis, suite à un « accident de la vie », comme on dit pudiquement aujourd’hui, à l’été 2003, je décide de quitter mon métier d’origine et de reprendre des études. J’intègre alors dans un premier temps le BPREA viticulture et œnologie au lycée agricole d’Auxerre puis un BTS viti-oeno à Mâcon dans l’optique de créer mon propre domaine dans le sud de la France, car depuis plusieurs années, ce sont ces vins là qui me plaisent.

L’aventure est en marche.

Acheter des vignes, quel phantasme !! Vous imaginer un peu, vous qui êtes amateur de vin ? Avoir SES vignes, faire SON vin avec ? Que personne me dise qu’il n’y a jamais pensé !

Moi, ce phantasme, j’ai décidé de le réaliser, petit à petit mais LE FAIRE !!

Alors je me renseigne pour acheter des vignes, via la SAFER et des agences immobilières spécialisées dans ce domaine. Je vais en voir, dans les Corbières, à Saint Chinian. Fin 2005, on me propose des vignes à Lesquerde, dans le Roussillon. Tout de suite, je tombe amoureux des paysages de ce département. De plus, j’avais rendez-vous avec Hervé Bizeul pour lui décrire mon projet et avoir son opinion. Et là, c’est la chute libre. Je lui parle vinification, terroir, cépage, il me répond marché, fonds de roulement et trésorerie. Non pas qu’il n’est pas passionné, bien au contraire (comment faire ce qu’il fait sans l’être ?) mais alors que je ne voyait que le côté passionel du vin, il me remet les pieds sur terre en me rappelant la première et plus essentielle règle : VENDRE SON VIN.

C’est lors de ce rendez-vous qu’il me propose d’intégrer sa nouvelle pépinière d’entreprise accolée à son projet Walden (voir : www.walden.fr). Après réflexion et plusieurs alternatives proposées par Hervé, j’accepte.

C'est dans la boîte!

Ce que je ne vous ai pas dis dans mon premier message, c’est qu’aujourd’hui, je ne suis pas dans le Roussillon. Et oui, je suis actuellement en Bourgogne, à environ 15 km au nord d’Auxerre, et donc il faut déménager. En plus, je ne suis pas tout seul, je suis accompagné par la maman de 2 charmants bambins de presque 3 ans. Alors, ça ne se fait pas tout seul !!

Au début du mois, nous sommes donc partis en « vacances » dix jours près de Perpignan tous les quatre, notre principale mission étant de trouver un logement.

Nous cherchions une petite maison à louer avec un jardin ou une terrasse et donc de préférence à l’extérieur de Perpignan et plutôt à l’ouest ou nord-ouest de Perpignan. Ce que l’on peut dire c’est que nous n’avons pas eu l’embarras du choix ! Heureusement, nous avons trouvé une charmante petite maison dans un village à quelques minutes de Perpignan.

Et donc, maintenant, il faut faire les cartons ! Dans un premier temps, nous pensions utiliser les services d’un déménageur professionnel. Mais leur indisponibilité et le coût plus qu’élevé de l’opération nous oblige à nous rabattre sur un bon vieux déménagement avec location de camionnette et coup de main de copains et famille.

Nous allons donc faire un premier voyage le week-end prochain avec location d’un garde-meuble (j’appelle demain !). Et pour terminer, avec femme et enfants, dans quinze jours, pour intégrer notre nouveau logement et démarrer notre nouvelle vie en Catalogne.